Pau fait le pari du bus à hydrogène

C’est une première et elle fera date : l’Agglomération de Pau Béarn Pyrénées a préféré la solution de la pile à hydrogène plutôt que la batterie pour sa future ligne de bus électriques à haut niveau de service (BHNS), qui sera déployée en 2019. Ce sont ainsi 8 bus à hydrogène articulés de 18 m du constructeur Belge Van Hool qui seront exploités par le Syndicat Mixte des Transports Urbains (SMTU). Ils seront alimentés en hydrogène par une station opérée par ENGIE, qui aura la particularité de produire ce carburant à partir du réseau électrique et d’eau, au moyen d’un électrolyseur fourni par le Britannique ITW Power. La station à hydrogène sera située dans le dépôt de bus.

L’investissement s’élève à 13,5 millions d’Euros, dont 7 apportés par la région Nouvelle Aquitaine et l’Europe, dans le cadre des programmes de recherche du FCH-JU (Fuel Cell and Hydrogen Joint Undertaking).

L’agglomération Paloise, qui se veut un territoire exemplaire, et déjà engagé dans la transition énergétique a mûrement réfléchi avant de faire le pari d’une motorisation innovante, inédite en France mais qui est appelée à monter en puissance en Europe comme en Chine. L’agglomération et le Syndicat Mixte de Transports ont lancé les premières études en 2015 et ont engagé l’année suivante une consultation publique pour le matériel roulant et son mode d’approvisionnement en énergie. 12 candidats ont répondu à l’appel d’offres.

A l’arrivée, les deux seules options étaient, d’un côté, un bus électrique à batterie avec un système de recharge par pantographe en bout de ligne, et de l’autre, un bus avec pile à combustible. Cette dernière a été préférée car il n’était pas nécessaire, dans le cas de l’hydrogène, d’implanter des points de recharge supplémentaires pour desservir les grands pôles que sont le Zénith, le stade ou encore la gare SNCF. L’autre argument qui a pesé dans la balance est l’existence d’un seul standard pour le ravitaillement en hydrogène, alors que la recharge rapide par captation (pantographe, bras articulé) n’est pas normalisée. De plus, il n’était pas acquis que des bus articulés de 18 m avec batteries puissent se charger dans les mêmes conditions que des bus électriques standards de 12 m.

C’est donc une grande première qui va se produire en France en 2019, avec des bus équipés d’une pile à combustible (d’origine Ballard) de 100 kW, et disposant d’une autonomie de 240 km. Le plein d’hydrogène ne prendra que 15 mn. L’économie envisagée est de 31 100 litres de gazole par bus, avec une flotte qui ne rejettera que de la vapeur d’eau, aucun gaz à effet de serre et encore moins de particules. Certes, le bus à hydrogène est pour le moment plus cher, car il ne bénéficie pas des économies d’échelle déjà acquises pour les batteries. Mais, une baisse des coûts de l’ordre de 70 % est attendue à l’horizon 2025-2030 pour les piles à combustible.

Pour ceux qui en douteraient, la technologie de l’hydrogène est maîtrisée et ne pose donc aucun problème de sécurité. Il faut savoir en effet que les bus de ce type en circulation dans le monde ont parcouru plus de 8 millions de km, sans incident. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si l’Europe a choisi d’aider au déploiement de 400 bus à hydrogène d’ici 2020, et si la Chine vise quant à elle un objectif de 1000 bus en 2025. Le Japon compte notamment sur ce moyen de transport, lors des JO de Tokyo en 2020, pour illustrer sa vision d’une société de l’hydrogène.

Avec un tel choix, qui va à l’encontre d’une certaine pensée unique décrétant que l’électrique à batterie est la seule solution, l’agglomération de Pau Béarn Pyrénées montre que les territoires ne se laissent pas dicter leurs choix. Il est à noter qu’elle avait déjà fait preuve d’un intérêt pour cette forme d’énergie en participant à l’Appel à Projets Territoires Hydrogène organisée par l’Etat. Le projet du SMTU, qui a été retenu et labellisé, a pour nom « Electromobilité intégrée » et prévoit justement d’utiliser l’hydrogène comme vecteur d’énergie pour la mobilité. Pau a des raisons de s’autoproclamer capitale de la transition énergétique.

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à propos de l'auteur

Laurent Meillaud

Laurent Meillaud

Journaliste automobile depuis plus de 30 ans, suivant les évolutions technologiques, je m'intéresse aussi aux énergies alternatives, dont l'hydrogène que je suis depuis 20 ans. J'ai co-écrit un ouvrage à ce sujet en 2007 avec Pierre Beuzit, ancien patron de la R&D chez Renault. Je collabore également depuis 2016 à la newsletter de France Hydrogène.

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