L’hydrogène métallique reproduit sur terre

C’est une première mondiale. Deux chercheurs de la Direction des applications militaires du CEA et un chercheur émérite du CNRS, détaché au synchrotron SOLEIL*, viennent de franchir une étape historique en observant pour la première fois de l’hydrogène sous forme métallique. Il s’agit de la forme sous laquelle le plus simple et le plus abondant atome de l’univers se trouve au cœur de planètes comme Jupiter ou Saturne. C’est une prouesse technologique qui ouvre des perspectives intéressantes pour le stockage de l’hydrogène.

L’idée avait été émise il y a 80 ans par le Prix Nobel Eugene Wigner**. Et depuis 1935, plusieurs équipes scientifiques ont tenté d’atteindre cet état en laboratoire.  Florent Occelli, Paul Loubeyre et Paul Dumas ont donc réussi, grâce à la mise au point d’un nouveau type de presse à enclumes de diamant dépassant 4 millions d’atmosphères. Ils ont enfermé dans une petite cavité un échantillon d’hydrogène sous sa forme solide. A une pression plus élevée qu’au centre de la Terre, l’hydrogène s’est déchiré. Les électrons de l’atome se sont alors séparés de l’attraction des protons et ont acquis la propriété de conduire l’électricité. Comme le fait un métal.

L’intérêt justement est qu’à l’état métallique, l’hydrogène s’avère supraconducteur et pourrait donc conduire l’électricité sans perte. Si ce phénomène pouvait être reproduit à température et à pression ambiantes, cela constituerait une avancée considérable pour le stockage de l’hydrogène qui est un enjeu énergétique primordial. Si cette perspective apparaît encore aujourd’hui difficilement accessible pour l’hydrogène dans sa forme pure, une voie prometteuse est de le synthétiser sous forme d’alliage avec d’autres métaux. Les premiers résultats sur la synthèse de super-hydrures, comme FeH5 ou LaH10, sont très encourageants.

*qui se trouve sur le plateau de Saclay.

**Le scientifique britannique supposait à l’époque que ce changement de phase se produisait à 250 000 fois l’atmosphère terrestre. A très haute pression, l’hydrogène (normalement isolant) se comporte alors comme un métal conducteur.

Cet article vous a plu ? Partagez-le !

à propos de l'auteur

Laurent Meillaud

Laurent Meillaud

Journaliste automobile depuis plus de 30 ans, suivant les évolutions technologiques, je m'intéresse aussi aux énergies alternatives, dont l'hydrogène que je suis depuis 20 ans. J'ai co-écrit un ouvrage à ce sujet en 2007 avec Pierre Beuzit, ancien patron de la R&D chez Renault. Je collabore également depuis 2016 à la newsletter de France Hydrogène.

Nos derniers articles

HyPorts