Etude ADEME : la France pourra-t-elle produire son propre hydrogène vert de façon compétitive ?

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Etude Ademe : la France pourra-t-elle produire son propre hydrogène vert de façon compétitive ?

Alors que l’on attend toujours la révision de la stratégie nationale, l’ADEME traite une question délicate. Pourra-t-on produire de l’hydrogène sur le territoire national de façon compétitive et privilégier ainsi notre souveraineté énergétique ? Ou bien le recours à l’importation serait-il moins cher, en valorisant l’électricité renouvelable produite dans les pays à très fort potentiel photovoltaïque ou éolien ?

Et d’abord, un rappel : environ 400 000 tonnes d’hydrogène sont produites à partir de gaz fossile et consommées par l’industrie française (chimie et raffinage essentiellement). Mais, c’est de l’hydrogène gris, entraînant l’émission de 4 millions de tonnes de CO2. L’alternative est l’électrolyse pour produire à partir d’eau et d’électricité (renouvelable ou nucléaire) de l’hydrogène bas carbone. C’est la voie que privilégie la France, à travers sa stratégie et un budget de 9 milliards d’euros.

Gros décalage dans les capacités d’électrolyse

Seulement, il y a loin de la coupe aux lèvres. En 2020, la France s’était fixé l’objectif d’atteindre une capacité de production de 6,5 gigawatts d’hydrogène bas carbone et/ou renouvelable d’ici 2030 (soit l’équivalent de 650 parcs éoliens terrestres). Cela représente 600 000 tonnes d’hydrogène. Or, les projections font apparaître seulement 0,3 gigawatt de capacité de production installée d’ici 2026. Même désillusion en Europe, où la Cour des Comptes critique des objectifs irréalistes. « Aujourd’hui, l’heure est à la révision à la baisse de tous ces objectifs, bien trop ambitieux compte tenu du temps nécessaire au développement de la filière hydrogène et des technologies associées », explique Luc Bodineau, coordinateur du programme Hydrogène à l’Ademe.

Certes, il y a des grands projets en France, à l’image du projet Normand’Hy de Port-Jérôme (200 MW de capacité d’électrolyse en 2025) et de Masshylia à La Mède (5 tonnes par jour). Mais, cela risque de ne pas suffire.

Une fenêtre de 20 ans pour rester compétitif… à condition d’investir

Faut-il alors importer de l’hydrogène ? Certains pays d’Amérique du Sud ou d’Afrique du Nord bénéficient de gisements d’énergies renouvelables très favorables qui pourraient permettre de produire de l’hydrogène sur place à bas coût, rappelle l’Ademe. Mais, il faut le liquéfier pour le transporter par bateau (il y a aussi le stockage sous forme d’ammoniac qui n’est pas évoqué). Ou le transporter par des canalisations « qui n’existent pas encore ».

À l’horizon 2030, l’analyse de l’ADEME montre que la production d’hydrogène en France « resterait compétitive dans la majorité des cas ». Et ce jusqu’à 2050. Plus que le seul coût financier, c’est la question de la souveraineté qui s’invite dans le débat. Avec ces questions : faut-il consolider une production décarbonée d’ammoniac sur le territoire dans une logique de souveraineté nationale ? Avons-nous intérêt à développer une production française d’e-kerosène ? « Développer le stockage et les infrastructures associées est indispensable si l’on veut être compétitif d’ici 2030 et 2050 » indique Luc Bodineau. Ces éléments seront-ils au rendez-vous dans la stratégie révisée ?

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à propos de l'auteur

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Laurent Meillaud

Journaliste automobile depuis plus de 30 ans, suivant les évolutions technologiques, je m'intéresse aussi aux énergies alternatives, dont l'hydrogène que je suis depuis 20 ans. J'ai co-écrit un ouvrage à ce sujet en 2007 avec Pierre Beuzit, ancien patron de la R&D chez Renault. Je collabore également depuis 2016 à la newsletter de France Hydrogène.

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