L’OPECST se penche sur les modes de production de l’hydrogène

L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) a présenté ce matin sa dernière note scientifique qui porte sur « les modes de production de l’hydrogène« . « C’est un sujet qui passionne », a déclaré en introduction Gérard Longuet, qui est le premier vice-Président de cet office et le rapporteur de ce document de 10 pages (4 de synthèse, 6 pour les références). La note, dont l’élaboration s’est étalée sur trois mois (de décembre à mars), fait la synthèse des différents procédés de production, du vaporeformage à la dissociation thermochimique, avec un accent sur l’électrolyse. Comme l’explique le sénateur de la Meuse et ancien ministre, « loin d’être une solution miracle, l’hydrogène peut cependant devenir un vecteur d’énergie pertinent sous la condition d’une production décarbonée, soit par captage du carbone en cas d’utilisation d’énergies fossiles, soit par recours à une électricité d’origine nucléaire ou renouvelable en cas de production par électrolyse de l’eau ».

La note souligne que « cette dernière technique, plus chère (elle coûte 4 fois plus que le vaporeformage) et nécessitant un apport d’eau et surtout d’électricité, n’est donc pas en soi synonyme de neutralité carbone et représente un défi d’avenir sur lequel la France parie de façon justifiée mais exclusive ». On peut lire dans ce document que la France a fait « le choix exclusif de la production d’hydrogène par électrolyse de l’eau » et que « la Commission européenne soutient une cible encore plus étroite de production par électrolyse, alimentée par les seules ENR ». Et la note enfonce le clou : » le nucléaire n’est pas évoqué par la stratégie européenne pour l’hydrogène présentée le 8 juillet 2020″.

Au passage, la note met des chiffres en face des ambitions européennes. Ainsi, l’objectif européen d’installation de 6 gigawatts (GW) d’électrolyseurs pour la production d’un million de tonnes d’hydrogène renouvelable d’ici 2024 puis de 40 GW pour dix millions de tonnes d’ici 2030 doit être confronté au nombre d’éoliennes que cela représente : respectivement au moins 15 000 et 150 000 éoliennes (soit en surface de panneaux photovoltaïques environ 800 000 hectares et 8 millions d’hectares).

Le document note que le problème est celui de l’origine de l’électricité qui doit être verte, faute de quoi « le bilan carbone serait encore moins bon que la séparation directe de l’hydrogène présent dans le gaz naturel ». Pour l’OPCEST, « seules l’énergie nucléaire et l’hydroélectricité présentent le double intérêt d’être pilotables et décarbonées ». Interrogé par nos soins, M. Longuet a déclaré « à titre personnel qu’il serait fou de se priver de l’énergie nucléaire », car « les énergies renouvelables ne pourront pas à elles seules fournir les quantités d’électricité nécessaires ».

Bien que peu matures et souvent plus coûteux, les autres modes de production décarbonés d’hydrogène ne doivent pas être abandonnés, ni sur le plan de la recherche ni sur celui de l’industrie. La note fait notamment référence à la production d’hydrogène à partir de biomasse, jugée « très vertueuse bien qu’en concurrence avec la méthanisation ». Les premières unités de production d’hydrogène par thermolyse de biomasse démarrent actuellement à Strasbourg, avec l’entreprise Haffner Energy (pour un coût inférieur à 5€/kg). La note évoque par ailleurs la dissociation de l’hydrogène et de l’eau par oxydation du fer, par photosynthèse (avec l’activité de microorganismes tels que des algues et des bactéries) ou encore par des procédés biomimétiques de photocatalyse et photoélectrocatalyse.

L’Office proposait dès 2013 dans son rapport « L’hydrogène : vecteur de la transition énergétique » de coordonner le développement de la filière – depuis la production de l’hydrogène jusqu’aux usages – et de fédérer les acteurs. Ces recommandations restent d’actualité, estime l’OPCEST qui plaide pour « une politique énergétique cohérente, réaliste et responsable ».

*Depuis 1983, l’OPECST a pour mission d’informer le Parlement des conséquences des choix de caractère scientifique et technologique afin d’éclairer ses décisions. A cette fin il recueille des informations, met en œuvre des programmes d’études et procède à des évaluations.

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à propos de l'auteur

Laurent Meillaud

Laurent Meillaud

Journaliste automobile depuis plus de 30 ans, suivant les évolutions technologiques, je m'intéresse aussi aux énergies alternatives, dont l'hydrogène que je suis depuis 20 ans. J'ai co-écrit un ouvrage à ce sujet en 2007 avec Pierre Beuzit, ancien patron de la R&D chez Renault. Je collabore également depuis 2016 à la newsletter de France Hydrogène.

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