Hier, les principaux acteurs de la compétition automobile sont venus à Orléans exposer leurs vues sur l’intérêt du moteur à hydrogène. Ce thème monte en puissance mais il y a encore un certain nombre de verrous à lever.
La journée organisée par la SIA (Société des Ingénieurs de l’Automobile), l’Estaca et l’Université d’Orléans a été riche en enseignements. Le choix de la compétition automobile comme fil rouge a permis de faire émerger un certain consensus en faveur du moteur à combustion (pour le bruit et les performances) et de l’hydrogène liquide pour une meilleure densité énergétique et une sécurité plus élevée. Vous pouvez retrouver ici notre article reflétant les propos tenus lors de la table ronde finale avec la FIA, l’ACO, AVL et Alpine.
Nous vous proposons aujourd’hui d’évoquer la technique. Avec, pour commencer, un rappel : la première application d’un moteur à hydrogène en course remonte à 2013 avec une Aston Martin Rapide S adaptée par l’autrichien Alset Global. La voiture a couru aux 24 h du Nürburgring.
Le moteur essence conservé à 80 %
Dans les côtés positifs, on peut déjà affirmer que le moteur à hydrogène nécessite assez peu d’adaptations. Ainsi, Loïc Combemale d’Oreca a souligné qu’on conservait 80 % du moteur à essence. Même constat chez AVL qui peut réutiliser de l’existant pour son « Race Tech ». Pour sa part, Lionel Martin de Bosch Engineering a expliqué qu’il n’avait pas été nécessaire de modifier la chambre de combustion pour le moteur de la Ligier JS2 RH2. L’équipementier a utilisé au niveau du logiciel les outils de sa plateforme, mais avec des fonctions spécifiques à l’hydrogène comme le pilotage de la pré-injection, de l’injection d’hydrogène et de l’eau et la gestion du stockage d’hydrogène. Oreca a aussi développé un soft adapté à l’hydrogène.
L’ambition chez Bosch est d’augmenter de 20 % la performance par rapport à l’essence et de doubler l’autonomie en mode course (20 mn aujourd’hui). Pour une discipline comme la F1, la FIA vise un objectif de 300 km en course avec un plein. Soit, l’équivalent du moteur hybride aujourd’hui.
Des verrous à lever et la question des rejets polluants
Mais il y a des verrous à lever. Il a beaucoup été question de pré-allumage, de pré-injection et de réglage de température pour l’injection d’hydrogène. Autant de paramètres qui peuvent jouer sur les phénomènes de cliquetis et la fiabilité. « Nous avons besoin d’engager un dialogue avec les fabricants d’injecteurs », a déclaré Olivier Laget de l’IFPEN qui faisait état d’une étude avec la FIA. En parlant d’injecteurs, Phinia était là en tant que régional de l’étape (son site est à Blois). Baudouin Gomot a pu ainsi révéler que l’équipementier travaillait avec des clients dans le domaine de la compétition et de la haute performance, en plus de la mobilité intensive (son utilitaire à moteur H2 était exposé à Orléans). La société va d’ailleurs produire en petits volumes ses premiers injecteurs à hydrogène dès le second trimestre de 2025.
Au-delà de l’injection, il se pose la question du stockage avec l’hydrogène liquide qui semble plébiscité. Mais, il faudra aussi gérer l’approvisionnement en amont et la distribution du carburant. Toyota a cependant montré que cela était possible. Pour sa part, MissionH24 utilise une station mobile de TotalEnergies.
Toute la question est de savoir ensuite si on exigera de la part du sport automobile le zéro émission absolu, ou pas. Les acteurs qui ont pris la parole hier (Bosch, Ferrari) ont évoqué un mode de combustion « ultra lean » qui réduit au maximum le rejet d’oxydes d’azote (NOx). Avec un seuil inférieur à 20 ppm, le moteur à combustion pourrait aussi être homologué pour des voitures de sport sur route. Mais si demain on demande de l’exemplarité au monde de la compétition automobile, avec plus aucun rejet polluant, ce sera un vrai problème.
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