Mitch et Soize : les pionniers du taxi indépendant H2

Si l’on cite souvent l’exemple de Hype, avec sa flotte de plus d’une centaine de taxis à hydrogène à Paris, on ne connaît pas forcément celui des Taxis de Chautagne. Située au bout du Lac du Bourget, en Savoie, elle utilise deux Hyundai Nexo.

Michel et Françoise Caviglioli, alias Mitch et Soize, sont mari et femme et font tous les deux le métier de chauffeur de taxi avec une voiture à hydrogène. Mitch avait contacté Hydrogen Today il y a un certain temps. Le hasard de la vie a fait qu’on a enfin pu se rencontrer. Hyundai lui a en effet demandé de faire une course entre Chambéry et Val Thorens. Et on m’a proposé de monter à bord.

Et c’était vraiment sympathique. Originaire de Suisse, Mitch nous a raconté toute son histoire, depuis la rencontre avec sa femme française grâce à l’ULM, jusqu’à son grave accident de voiture qui l’a fait passer de chauffeur routier à taxi. Un choix qu’ils ont fait à deux, madame ayant décidé de l’accompagner dans sa nouvelle aventure. Avant, ils roulaient en Diesel. Le couple a voulu passer à l’électrique, envisageant une Tesla Model X, mais il a été dissuadé par une cliente, ingénieure et spécialiste des énergies renouvelables. Du coup, Mitch et Soize se sont tournés vers l’hydrogène. Parce que le coffre de la Toyota Mirai était trop petit, ils ont choisi la Hyundai Nexo. La voiture était d’abord pour Françoise, mais Michel a voulu avoir sienne aussi (après s’être amusé avec le système de stationnement automatisé pilotable à distance).

Le long du trajet, nous avons discuté avec Michel. Et cela a été riche d’enseignements. D’abord, les Nexo roulent tous les jours. Celle de Soize affiche 109 000 km et celle de Michel 76 000 km. Ils sont très satisfaits. Leur Nexo parcourt entre 500 et 700 km par jour en moyenne. Mitch arrive à faire plus de 700 km avec un plein (ce qui m’a incité à lui dire qu’il était aussi bon que Bertrand Piccard) et estime qu’il pourrait aller jusqu’à 1 000 km en roulant à 60 km/h. Il faut dire qu’à la montagne, « on ne ne consomme rien du tout en descente ». Pour Michel, « c’est super au niveau du confort de conduite ». Il dit que les clients apprécient – tout comme le couple – le silence et l’absence de vibrations. D’ailleurs, « des clients s’endorment sur le trajet » s’amuse notre chauffeur.

Ce choix n’a pas été fait pour faire des économies (le leasing, sur 5 ans, est plus cher et le prix de l’hydrogène est élevé). Mais, comme le couple parcourt plus de 50 000 km par an, il a obtenu de la part de la région Auvergne Rhône Alpes (via la société Hympulsion) un coup de pouce permettant d’avoir le kilo d’hydrogène à 10 euros au lieu de 12,50. Et a ce tarif là, la Nexo est à parité avec un véhicule Diesel équivalent. Et même si la maintenance, assurée par un concessionnaire Hyundai, est plus fréquente (des opérations de vérification sur les fuites, des révisions intermédiaires et une grosse opération au bout de 70 000 km à 1200 euros où on change le filtre à ions sur la pile, ainsi que son huile de refroidissement), ça revient moins cher que pour un taxi Diesel. Sa seule inquiétude concerne la durée de vie de la pile à combustible, même si la voiture est garantie 5 ans kilométrage illimité Il a lu sur le site du club Nexo aux USA que 150 véhicules avaient fait l’objet d’un rappel pour changer la PAC. Or, celle-ci coûte 29 000 euros…

Pour l’anecdote, le siège de Hyundai en Corée du Sud connaît l’existence de Mitch et Soize. Il n’existe nul autre client dans le monde qui fait autant de km…

En ce qui concerne les pleins, Mitch et Soize se ravitaillent à la station de Chambéry qui distribue de l’hydrogène vert. Mais, il y a eu récemment un problème de compression et elle ne pouvait plus fournir d’hydrogène à 700 bars. Proximité oblige, les Taxis de Chautagne sont allés chez Atawey à Technolac pour faire le plein en 350 bars. Sinon, le plein se fait à Lausanne (chez COOP qui a ouvert une station), ou à Valence. En raison de problèmes techniques à répétition, il ne va pas à la station Air Liquide de Sassenage près de Grenoble.

« On gagne notre vie », assure Mitch. Et avec sa femme Soize ils sont visiblement très fiers de rouler en hydrogène sur les routes de montagne.

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à propos de l'auteur

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Laurent Meillaud

Journaliste automobile depuis plus de 30 ans, suivant les évolutions technologiques, je m'intéresse aussi aux énergies alternatives, dont l'hydrogène que je suis depuis 20 ans. J'ai co-écrit un ouvrage à ce sujet en 2007 avec Pierre Beuzit, ancien patron de la R&D chez Renault. Je collabore également depuis 2016 à la newsletter de France Hydrogène.

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