BorgWarner : le plus avancé dans le moteur H2 ?

BorgWarner croit au potentiel du moteur à combustion alimenté par de l’hydrogène (H2). Et la recherche est pilotée depuis la France, au centre d’ingénierie et de production de Blois.

Sur un site qui a connu son heure de gloire avec le Diesel (et qui a porté les couleurs de Lucas Diesel, puis Delphi), à 3 km d’un des plus beaux châteaux de la Loire, des ingénieurs essaient de démontrer qu’il est possible d’adapter le moteur thermique et de le convertir à l’hydrogène pour décarboner le transport. BorgWarner a mis au point les composants (injecteurs, vannes, rails) à l’été 2021 et a intégré la technologie à bord de deux utilitaires l’année d’après. Le groupe fait rouler ses véhicules sur route ouverte et a procédé à des mesures qui permettent de déterminer quel est le rendement d’un moteur à hydrogène en conditions réelles.

Pour Jean-Luc Béduneau, qui pilote l’innovation à Blois, le rendement est équivalent à celui d’un moteur Diesel. Et c’est même mieux par temps froid. De plus, il n’y a plus à gérer le dépôt de suies et les particules. L’équipementier a fait le choix d’adapter dans un premier temps des utilitaires du marché, avec un Peugeot Boxer, puis un Citroën Jumper. Ils ont parcouru des milliers de km et ont été testés par deux milliers de personnes. L’autonomie se situe entre 300 et 500 km, contre 248 km pour la version électrique. C’est du quasi zéro émission (0,4 g par km) et les rejets de NOx (oxydes d’azote) sont en-dessous de ce que devrait proposer la future norme Euro 7, avec 3,9 mg par km au lieu de 60. Le surpoids est de 240 kilos : un chiffre à comparer aux 450 kilos de batteries pour électrifier un tel véhicule.

Ces données seront partagées la semaine prochaine à Vienne (Autriche), dans le cadre d’un symposium sur les moteurs qui est un rendez-vous mondialement connu.

Par rapport à un utilitaire comparable et à pile à combustible (en l’occurrence le Master H2 Tech d’Hyvia), les Boxer et Jumper transformés par Borgwarner ont une autonomie légèrement supérieure (450 km contre 400 km) et font le plein plus rapidement (74 km par minute, contre 60). La consommation d’énergie est toutefois légèrement meilleure sur le Master à pile à combustible (0,7 kWh par km contre 1 kWh pour le Boxer et le Jumper).

Parmi les concurrents, chez les équipementiers, on peut citer notamment Bosch et Denso. Borgwarner est assez confiant, car les constructeurs reconsidèrent la question du moteur à combustion H2. Ils étaient sceptiques en raison de l’échec de BMW, mais les progrès apportés par le turbo et l’injection directe changent déjà la donne. D’autre part, les annonces de Toyota – qui travaille sur un moteur de ce type en compétition, en parallèle de la pile à combustible – ont aussi semé le trouble. L’adaptation n’est pas si compliquée, mais il faut des modifications au niveau de la culasse, des injecteurs, du piston et il faut par ailleurs des matériaux adaptés. Borgwarner estime qu’il y a des marges de progrès, en travaillant sur le taux de compression, l’allumage et sur les logiciels de contrôle. En attendant, des centaines d’injecteurs à hydrogène « made in Blois » se trouvent chez des constructeurs du monde entier.

Le groupe a investi plusieurs millions sur ce projet. Il a adapté des bancs de test et a aussi installé un coin hydrogène avec un électrolyseur (d’origine Elogen et produisant 20 kilos par jour) et des bombonnes d’hydrogène. Pour ses tests de moteurs et la recharge des deux véhicules, Borgwarner consomme 250 kg par jour.

Dès la fin de cette année, la production en série va débuter pour des véhicules « off road ». Le rendez-vous est fixé à début 2025 pour des constructeurs qui veulent l’appliquer sur des utilitaires.

Si vous voulez en savoir plus sur Borgwarner voici notre dernier article sur le groupe.

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à propos de l'auteur

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Laurent Meillaud

Journaliste automobile depuis plus de 30 ans, suivant les évolutions technologiques, je m'intéresse aussi aux énergies alternatives, dont l'hydrogène que je suis depuis 20 ans. J'ai co-écrit un ouvrage à ce sujet en 2007 avec Pierre Beuzit, ancien patron de la R&D chez Renault. Je collabore également depuis 2016 à la newsletter de France Hydrogène.

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