L’hydrogène en Formule 1 : un thème de mémoire instructif (2/2)

Après notre premier volet consacré aux e-fuels, voici la suite de notre analyse du mémoire consacré à l’hydrogène en Formule 1 (réalisé par Keenan Mered, le frère de Mikaa Blugeon-Mered). On s’intéresse à la F1 à moteur hydrogène, une hypothèse assez crédible.

Mémoire Formule 1 hydrogène

Ce que révèle ce mémoire documenté, et qui repose aussi sur des entretiens, c’est que le monde de la Formule 1 a songé à basculer dès 2026 dans le moteur à combustion à hydrogène. C’est presque un scoop. Mais, il y a eu plusieurs facteurs bloquants : les risques liés à la sécurité et l’inadaptation des infrastructures et des réservoirs par rapport aux exigences de la F1. Il faut tenir l’équivalent de 305 km avec un plein (ce qui n’est pas jouable aujourd’hui) et le temps de remplissage avec de l’hydrogène gazeux n’est pas assez rapide. De plus, il fallait que les molécules d’hydrogène soient disponibles à travers le monde.

Avant d’aborder les pistes qui permettent d’entrevoir une telle possibilité, Keenan Mered rappelle que de grands noms de la F1 ont déjà fait part de leur intérêt pour l’hydrogène. Ross Brawn, l’ancien directeur sportif de la F1 entre 2017 et 2022, a par exemple évoqué à plusieurs reprises un avenir pour l’hydrogène en F1. Il y voyait l’avantage de conserver l’émotion de la discipline tout en répondant aux problématiques environnementales. Ce qui conduit à ces réflexions, de l’aveu d’un responsable de la FIA, c’est que les décideurs de la F1 ont une meilleure connaissance de l’hydrogène. Et même si certains constructeurs sont ouvertement contre, il y en a un certain nombre qui y voient beaucoup d’intérêt.

Renault très chaud sur le sujet via Alpine

Sans surprise, Renault est cité comme un acteur favorable. Alpine a déjà pris la parole sur le moteur à combustion et le groupe explore plusieurs pistes (dont la pile à combustible chez Hyvia, où Keenan travaille en alternance). Le mémoire évoque Red Bull qui, depuis 2022 développe le châssis d’un prototype de course à hydrogène pour les 24 heures du Mans, en collaboration avec ORECA au travers de sa filiale Red Bull Advanced Technologies. Il est fait référence aussi à Williams Advanced Engineering (WAE) qui a été racheté par le groupe Fortescue, et qui a mis au point un pack hydrogène pour voiture de sport et de course. Et dans les nouveaux arrivants prévus en 2026, il est vrai que Honda et General Motors sont par exemple partenaires pour développer l’hydrogène. Il est rappelé que Ford a déposé un brevet sur le moteur à combustion hydrogène.

Le document s’interroge sur Mercedes, qui s’est lancé dans la voiture à hydrogène (avec la GLCF-FC) avant d’abandonner et d’aller sur le camion. Toutefois, l’un de ses partenaires est Ineos, qui s’intéresse beaucoup à l’hydrogène.

Rendez-vous après 2030 ?

Ce que l’on apprend, au bout du compte, c’est qu’il faudra attendre la fin de la décennie et le développement de réservoirs polymorphes pour espérer l’intégration de l’hydrogène en course en F1. L’hydrogène liquide sera par ailleurs un candidat naturel, en raison de l’autonomie supérieure et de la vitesse de remplissage plus rapide. On en avait parlé sur Hydrogen Today, lors de l’événement Le Mans Hydrogène. Ce que pointe également ce mémoire, c’est que la plupart des pays qui se sont engagés à accueillir des GP de F1 après 2030 sont intéressés par l’hydrogène (Arabie saoudite, Émirats arabes unis, États-Unis, Canada, Australie…).

De façon globale, l’hydrogène pourrait changer l’image de la F1. Le mémoire voit des applications potentielles dans le process industriel (afin de décarboner la production de pièces pour les monoplaces), l’alimentation en énergie des installations, les déplacements sur le circuit (il est rappelé qu’Alpine F1 utilise des utilitaires Hyvia pour la logistique) et même pour la partie transport et logistique (déplacements par avion et bateau). De par son aura, la Formule 1 peut donner une vision planétaire à l’hydrogène et favoriser – qui sait ? – son usage aussi sur route.

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à propos de l'auteur

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Laurent Meillaud

Journaliste automobile depuis plus de 30 ans, suivant les évolutions technologiques, je m'intéresse aussi aux énergies alternatives, dont l'hydrogène que je suis depuis 20 ans. J'ai co-écrit un ouvrage à ce sujet en 2007 avec Pierre Beuzit, ancien patron de la R&D chez Renault. Je collabore également depuis 2016 à la newsletter de France Hydrogène.

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